14.1.13

On dépose nos baguettes


Chau Doc, marché flottant

Le soir s’est pointé au Cambodge. Nous y sommes depuis près de trois jours.  À Kampot, au sud-ouest, le temps était lourd, humide et gris. Hier c’était dimanche à Phnom Penh, la capitale du royaume des khmers, encore en deuil d’avoir perdu leur roi récemment. Les dimanches ici, comme ailleurs, sont universels avec ce qu’ils transportent de joie en famille et de morosité du temps qui file trop vite. Au programme ce fut : Phnom Penh, son palais royal, la pagode d’argent et quelques reflets de la culture des khmers. Pour le reste, j’ai fait un peu l’autruche et laissé tomber la visite du musée, du côté de l’horreur causée par les Khmers rouges. On essaie de se convaincre qu’il y autant à vivre ici qu’au Vietnam.

Depuis ce matin, je me sens un peu comme figé dans une impasse. Kampot est à trois heures de la capitale, on s’y rendait pour rencontrer un couple d’anglais qui a fondé un projet d’art au bénéfice d’handicapés (www.epicarts.org.uk). Arrivés affamés au café du projet pour le lunch, pensant faire une très belle rencontre et qui sait, peut-être prêter mains fortes; Katie et Hallam sont en voyage au nord du pays. Le rendez-vous est donc manqué. Ce devra donc être Kampot pour ses seuls attraits. Autrefois sans doute une perle indochinoise, la ville serait aujourd’hui sans charme sans cette jolie rivière qui la traverse, non pas par choix à première vue.

De toutes façons, c’est au Vietnam que nos cinq coeurs sont restés.  Le rythme des baguettes en l’air nous allait bien sans doute. Ou est-ce le Mékong,  Ho Chi Min ou la nourriture qui nous manquent? Non, ce sont ces gens que l’on a perçus dans une course folle mais fluide vers le progrès. Si j’avais eu leur langue ou plus de temps, j’aurais demandé : « C’est par où le progrès? ». Voyager, c’est souvent mesurer le delta entre nos vies et celles de ceux qu’on a le temps d’observer.

Téléphones portables et motocyclettes sont à la page; ils ne partent pas sans eux. Un guide à Can Tho nous disait : « Ici, un Vietnamien, une motocyclette », imaginez plusieurs millions de ces bolides à Ho Chi Minh et autant au mètre carré partout ailleurs. Partout vraiment.

Imaginez 82 millions de vietnamiens qui ont l’air d’être en train de dessiner un pays à toute vitesse, et non sans talent. C’est l’impression que j’ai eue. Le matin, des hauts-parleurs un peu communistes les sortent du lit aux p’tites heures. Allez hop : « Faites vos exercices… Attention le Mékong ne peut plus être votre poubelle pour bien longtemps… Au boulot, on a quelques décennies à rattraper. Rappelons nous de dire merci au bon gouvernement… » Dans la foulée, ils passeront à la pagode; 60% sont bouddhistes, 20 % catholiques, nul n’apparaissant intégriste. Le travail et le développement semblent les occuper sept jours semaines. Pour l’instant, ils sont au stade du brouillon dans ce qu’ils dessinent. Peut-être devraient-ils ne pas se rendre à la perfection occidentale?

Le progrès. La question me vient chaque fois que je suis en transport dans ces pays qui se développent, comme pour nous rattraper. Quand je vois tous ces gens affairés à transporter tout ou rien de façon ingénieuse, à réparer cette pièce-là, faute de pouvoir la remplacer. Des hommes encore aux champs. Ou encore ces femmes qui cuisinent dans la rue nourrissant le peuple de façon saine et savoureuse, ces vendeurs du quotidien. Les enfants qui jouent encore dehors. Pourquoi ne pas en rester là dans la quête de l’efficacité à tout prix? Je sais bien-sûr. Trop facile de trouver exotique le cueilleuse de riz ou habile le pêcheur qui lance ses filets dans les eaux du grand fleuve. Jolies évidemment ces scènes quand on n’y tient pas de rôle! Tout de même, la question se pose je crois. Où faut-il arrêter le progrès?

Bon, la nuit est tombée. Ils dorment tous autour de moi. À part ceux en bas au bar de l’hôtel situé sous la chambre. Pas trop long tes billets Yves! Tu vas finir par t’endormir toi-même quand tu te reliras un de ces jours. Et tous ces châteaux de cartes impressionnistes que tu fabriques. Fragiles mon vieux! Le lecteur avisé pourrait se dire, qu’après quelques maigres semaines en Asie, je ferais peut-être mieux d’en rester à partager les photos, ou encore les instants savoureux que nous vivons chaque jour… Cette question-là aussi se pose ;-). Les photos suivront promis…
                       
Les atouts de Kampot ne nous auront pas convaicus. Pour une rare fois, une journée au même endroit suffira. Demain, nous partons pour Sihanoukville, plus haut sur la carte au bord de la mer de Thaïlande. Marie nous rejoindra dans quelques jours à Siam Riep plus au nord. On y verra les joyaux d’architecture khmers (Angkor). Avec Geneviève, nous sommes comblés!

Bonne nuit.

Y

5 commentaires:

  1. Anonyme8:33 p.m.

    Très agréable et passionnant de vous lire. Bon plaisir les amis xxx. Marie-France Savoie.

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  2. Anonyme11:11 a.m.

    Bonjour la famille Poiré-Bleau,

    Tous les matins je m'empresse d'ouvrir mon portable afin de me savourer de vos commentaires, des plus intéressants de jour en jour. Vous êtes vraiment privilégiés et chanceux de vivre (en famille) tous ces beaux voyages. Bonne continuité dans vos visites.

    Amie d'Hélène, Lise
    P.S. Hélène m'a donné votre site.

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  3. Moi je les aime bien tes longs billets Yves !

    Bon voyage la famille !

    Grüße, Simon

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  4. Je n'irai pas jusqu'à te lire tous les matins Yves, après tout, j'ai une vie pleine de progrès à vivre.

    Sérieusement, ta plume est savoureuse. Elle se prend par grandes bouchées et on en redemande. Tu n'as définitivement pas ce fini et cette élégance sur la glace de Ste-Julie les dimanches soirs.

    Steffe (ton défenseur préféré)

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  5. Bonjour la famille en Asie. Quelles belles photos, vous nous faites rêver!
    profitiez DES DERNIERS JOURS AU MAXIMUM!
    On A HÂTE DE VOUS VOIR DANS 10 JOURS!
    Jasmine, Émile, Mathéo, Hélène et Franky
    Bisous xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx



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