29.3.05

La dame de Sasquisili

Posted by Hello


Je vous ai vu ce matin-là,
Au marché de Saquisili,
On vous y voit chaque jeudi,
Vendant de la laine d’alpaca.

Couverte de tant d’épaisseurs
D’un vieux chapeau de feutre vert,
Vous étiez-la juste derrière,
L'endroit où l’on vend des couleurs.

Pourrais-je vous faire cet aveu?
La beauté est l’œuvre du temps.
J’ai pu le voir en remarquant,
Que vos rides conduisent à vos yeux.

Je voudrais tant savoir de vous,
De l’histoire, du sentier qui mènent,
Aux bêtes qui ont produit la laine,
De ma veste achetée quelques sous.

lafamilleenequateur

28.3.05

Les châteaux d'Alandaluz

Après un tour de ce magnifique Equateur avec les grands-parents Poiré à revoir la côte encore sauvage et déserte, les montagnes enveloppées de nuages, ces volcans à peine visibles, les marchés, leurs acteurs toujours aussi colorés ainsi que les amitiés de la Sierra, nous voilà rentrés à la maison de Guayaquil. Un chez nous pendant deux mois. On a eu la chance de trouver un appartement meublé pour un si court délai. Encore plus chanceux, de s'y sentir bien, surtout les enfants! Déjà petits voisins et voisines y entrent dans leur vie et s'y font un petit coin amical (sans trop de barrière de langue).

Premières semaines où tous les jours on se rend à Pascuales, pueblo à 20 min. au nord de Guayaquil, où des religieuses québécoises assez flyées (partir du couvent à 70 ans pour aller s'installer dans un quartier dur et pauvre de l'Equateur!) ont fondé un centre pour femmes et une garderie éducative pour leurs enfants. Yves et moi, travaillons à mettre sur pied avec la collaboration des femmes, un projet de jardins en boîtes de bambou pour les familles du village. Déjà Vilma et Jacqueline se joignent au projet, deux pionnières de jardins dans leur pueblo.

Mathilde et Victor participent aux activités de la garderie, tandis que Marie et Florence font l'école avec les manuels du Québec, en attendant l'entrée scolaire, le 4 avril prochain.

Cela nous fait tout drôle de réapprivoiser l'horaire, la stabilité, le quotidien. Ça déboussole aussi. Nous qui avions la boussole bien active ces derniers mois. On côtoie un certain vide malgré l'horaire. Nos journées ne sont plus remplies d'autant d'images, de paysages, d'odeurs, de gens, enfin de toutes ces richesses qu'apportent les voyages.

On croyait en être rassasié, au contraire ils nous manquent. Notre appétit de découvertes est encore plus gourmand.

C'est une autre richesse que nous aurons la chance de palper ici, encore plus humaine cette fois, le fait d`échanger de plus près, de partager leur culture et de jongler avec leurs mots et leurs accents chantant.

Toutefois dès qu'il est possible on s'évade vers un autre petit coin du pays. Il y a deux semaines, on longeait la côte du Pacifique, là où la mer chaude nous charme et nous surprend à la fois par ses vagues puissantes.

C'est à Alandaluz qu'on a jeté l'ancre. Site écotouristique où se marient une nature luxuriante et un habitat tout de bambou construit, s'harmonisant au calme et à la quiétude. La plage est déserte mis à part ces quelques architectes et maçons qui édifient des projets immobiliers d'envergure. Leur matière première: le sable. Ils font tout à la main. Travail de patience et de persévérance.

Ils nous invitent dans des cités tantôt d'influence Inca, espagnole, francaise ou encore tirées directement des contes de fées. Des châteaux se forment sous leurs petites mains, petites mains naïves et pleines d'espoir. Mais la mer, curieuse, les visite aussitôt et d'une vague moussante les rappelle à eux, sans autre forme de procès!

Qu'il est doux ce temps d'observer l'enfant, ce passionné de la vie, des petites choses et des menus plaisirs. De la fourmi qu'il suit discrètement, à la cigale qu'il contemple . Au sable chaud qu'il embrasse de tout son corps sans pudeur ni censure. À la fleur qu'il hume et aux cailloux qu'il collectionne. Je ne me lasse pas de l'admirer goûter ainsi à la vie, aux moments qui passent sans penser à hier, ni à demain, avec toute sa spontanéité et sa candeur. Il me nourrit, me gâte et me chavire.

N'est-ce pas finalement l'invitation au plus beau des voyages? Un voyage au coeur de l'enfance, fusion de la mienne et de la sienne!

26.3.05

Les photos de février

Fin du voyage au Pérou. Vie d'appartement à Guayaquil et arrivée des grands-parents Poiré pour leur voyage en Équateur. Cliquez sur le titre du post pour voir les photos.

Lafamilleenequateur

24.3.05

Oh la p’tite vie!

23 mars

Comme à la maison, je suis toujours le dernier à me sortir du lit, vers 7 heures environ. Ce matin Victor, lui, était tout habillé dès 6 heures. Les gars de cinq ans ont de ces enthousiasmes… Il faisait gris et encore quelques courants d’air frais dormaient avec moi. Debout paresseux. En sortant de la douche, ils étaient à table. Puis sont arrivées les crêpes (il n’y avait plus de pain). « Maman, elles sont comme au Canada! ». C’est plutôt le sirop d’érable apporté par les grands-parents qui est comme au Canada.

À table, une pensée pour Wilma me croise l’esprit (la femme qui travaille avec nous depuis deux semaines). Elle dirigera le projet après notre départ. Cette femme de notre âge probablement vit à « Bastion Popular », tout près de Pascuales au nord de Guayaquil, juste à côté de la misère sa voisine. Qu’a-t-elle pris au déjeuner? Durant le mien, je lis le grand titre de l’Universo: El feriado politico duro solo 3 horas (le congé férié politique n’aura duré que trois heures); Où est la page qui m’intéresse… Les nouvelles internationales : Un adepte d’Hitler, 17 ans, s’est tué après avoir abattu trop d’enfants dans une école américaine (encore!). La vie du pape est en péril. Ça me revient : 43% des catholiques au monde se trouvent en Amérique du Sud (2% seulement je crois dans celle du Nord). Y a-t-il un article sur la Bolivie? Je suis révolutionnaire bolivien ces jours-ci… Facile à distance. Ah oui : Le Washington Post constate que la démocratie de l’Amérique est menacée par les soulèvements actuels en Bolivie (conflit sur l’exode des profits du gaz naturel). Le journal prétend qu’ils sont soutenus par des partis socialistes de gauche. Hugo Chavez est sans doute lié ajoute l’administration Bush (Toute l’Amérique n’aime pas le président Vénézuelien ces jours-ci). Bon, le temps file. À huit heures il faut être dans l’auto.

En route, les Cowboys fringants très fort finissent de me réveiller. Jusqu’à Mathilde qui chante. « Regardez, il fait 33 degrés sur ce panneau ». La conduite est toujours aussi folle; 15 minutes jusqu’au boulot. À chaque fois que nous tournons le dernier coin qui donne sur la rue de terre menant centre, je repense à l’Afrique. Que devient le Rwanda? Gatagarra? Quelle place ont ces humains dans ma vie, 12 ans plus tard? Avec moins de naïveté et de temps, on vit beaucoup de sentiments similaires à ceux qui nous animaient là-bas. Au centre de femmes où nous travaillons, à la garderie les monitrices attendent Victor et Mathilde pour 8h30. En sortant de la voiture, ce matin, les deux sont partis en courant. Victor vers ses chums et Mathilde en sens inverse; elle ne veut rien savoir. Armée de ses invincibles pleurs, elle réussira moins d’une demie heure plus tard à se faire sortir dans les bras de la Sœur qui dirige la garderie. Les grandes sont avec Daniela (22 ans) qui nous aide depuis quelques semaines avec les enfants; un appui pour ces deux élèves qui des jours se trouvent assises bien loin dans le fond de leur classe. Où sont les copines papa? Mais voilà! Le 4 avril, elles feront courageusement leur entrée à l’école primaire de Pascuales (très loin de Boucherville à tant de niveaux). Pour quatre semaines elles porteront le même costume que leurs prochaines amies de peaux couleur café. Les deux dans la même minuscule classe qu’elles ont visitée vendredi dernier (sans trop parler), sur le même banc. Quelle expérience de complicité me semble-il!

Entre-temps sœur Jeannine arrive. Avec son sourire et son petit mouchoir pour s’éponger le front. Bientôt 80, non pas des degrés ici, mais des années. Elle me raconte avec un sourire le burlesque épisode qui a fait jaser tout le pays aujourd’hui. C’est lié au grand titre du journal de ce matin. Le président s’est pointé à la télé hier soir vers 21h (mardi) pour décréter trois jours fériés (commençant le lendemain)!!! Malheureusement, la joie des travailleurs et de l’industrie du tourisme n’aura duré que trois heures. Suite aux pressions des maires de Quito, de Guayaquil et de Cuenca ainsi que de l’association des banquiers et d’autres gros bonnets qui ont appelé à boycotter le joyeux (des)ordre du président, le frère de ce dernier (Y a pas qu’aux USA où des familles entières sont au pouvoir) a annoncé que le gouvernement se rétractait. Tout le monde était donc au poste avec nous ce matin.

On est en planification; document descriptif, plan de projet, budget (5K$ pour un an!!!) Wilma trouve ça difficile. Ce qu’elle aime ce sont les plantes, les jardins, les autres femmes qu’elle veut aider. Et voilà qu’on l’attache à des concepts nord-américains de critères de succès, d’objectifs etc. Et Genou et moi qui essayons de la motiver en espagnol! Puis un fou rire quand Marie me corrige « Papa, c’est pas comme ça qu’on dit ». Durant tout l’avant-midi défilent les femmes qui viennent au centre chercher un prêt de 100$ qu’elles remettront à coup de 10$. Bientôt elles prendront des cours pour apprendre à semer un potager organique et viendront chercher les boîtes que le projet aura fabriquées avec elle. Si tout va bien, 100 femmes dans l’année vont payer trois dollars pour ce système ingénieux de jardin en caisse de bambou qu’elles coinceront dans leur cour.

Midi, il faut partir. Aujourd’hui, contrairement à l’habitude, je dois revenir durant l’après-midi. On fait un cadeau au projet. Geneviève et moi avons fait fabriquer une première boîte pour l’exposer rapidement au centre. Je reviendrai donc à Pascuales pour emprunter le pick-up de l’oncle de Robert (le chauffeur des sœurs). Nous irons ensembles chercher les boîtes, la terres, les plantes, etc. Victor et moi allons laisser les filles à l’appartement. « Pas le temps d’entrer, on va prendre une bouchée en chemin »; prétexte pour passer du temps de gars au Burger King. Pendant que mon précieux fils mange son sandwich, moi je savoure chaque goutte de temps que j’ai avec lui.De retour à une heure top à Pascuales. Ah oui, en passant devant le même panneau que ce matin, c’était 42 degrés.

Nous allions chercher les boîtes vers Samborondon; une des banlieues très riches de Guayaquil. 15 minutes de route à longer des complexes de types « gate-cities ». À la vue de la première, on trouve les couleurs pastel jolies, les toits de tuiles, les fontaines, les arbres taillés. Puis tiens, une plus grande, toute aussi gardée. Celle-ci a même son église! Ces gens-là prient dans la propreté ma foi. Puis, trop de couleur pêche ou de rose pâle, ça finit par lever le cœur. Tous ces gardiens qui protègent de l’argent qui tremblent de peur. Ça sent l’injustice. Wilma gagnera peut-être 1500$ cette année. Si elle est chanceuse. Elle m’a demandé si les écarts entre les pauvres et les riches étaient aussi grands au Canada. Eh…

Longue journée! Vers 4 heures Victor et moi sommes rentrés à la maison. Florence et Marie travaillaient bien avec Geneviève.Mathilde dormait encore, fatiguée de son expérience matinale. Je crois qu’en se réveillant, elle avait encore ces spasmes qu’ont les enfants après avoir trop longtemps pleuré. Vous savez ces trois prises d’air saccadées, suivies d'un long soupir qui tue l'angoisse…

Avec raison, les filles voulaient sortir. Il nous fallait une piscine pour se dégourdir et se rafraîchir.. Manquant de ressource, nous avons fini par plonger dans celle de l’Hôtel Oro Verde (5 étoiles) sur le toit de Guayaquil. Jumelée à un Spa, le coût d’entrée était de 18$ par personne. Oui, oui, pour la session! Inutile de vous dire qu’on a trouvé moyen de ne pas payer.

Voilà, Genou et les enfants sont couchés. Bientôt 1h am. Je vais les rejoindre. Il y a longtemps que ma souris fuyait notre blogue. J’avais pourtant reçu beaucoup de commentaires gentils à propos de mon dernier post sur Edwin. Je crois que ses silences m’auront appelé plus que je ne le croyais.

Après 5 mois d’aventure, la sédentarité et l’ordinaire nous rattrapent donc. « André, ça y est! Je crois que je suis rendu au moment de faire le test : je vais enfin trouver le temps de voir si après la vaisselle, sous la ligne de l’équateur, l’eau s’écoule vraiment à l’envers dans l’évier.

Oh la p’tite vie.

Ah oui, je vais finir de poster les photos de mars ce soir où demain.

Merci de votre complicité

Yves et cie

15.3.05

Hommage aux souliers rouges

Il y a de cela bien deux mois que je voulais vous partager leur existence alors que je les ai vus débarquer au Pérou. Des souliers pourtant bien ordinaires en apparence mais qui se sont avérés exceptionnels. J’en connais d’ailleurs la provenance coin St Laurent, Laurier, Montréal. J’en déduis donc leur qualité, mais tout de même, ils sont fantastiques, se faufilent partout, fouineurs comme tout et ils m’apparaissent inusables!

En escale pour trois semaines dans ce beau et grand pays, ils n’ont pas chômé! A leur arrivée à Lima, ils arpentaient déjà les grandes artères, les jardins, les musées et couraient pour traverser ces rues achalandées et pressées. Puis en longeant la côte sud du Pacifique, ils se sont promenés dans un désert de dunes et de sable. Ils ont navigué sur l’océan à la découverte d’îles « resort pour phoques et autres bêtes à plumes, à poil » en sentant de plus près ce fameux guano (chiure d’oiseaux) cultivé et commercialisé comme engrais national. Tintin en parle d’ailleurs dans Le temple du Soleil, plutôt le Capitaine en patois épicés!

Dans les montagnes de l’Altiplano, les souliers rouges ont gardé leur rythme curieux. A Arequipa, ville coloniale, ils ont piétiné le passé spirituel d’un immense monastère de religieuses dominicaines, trois heures durant! Mais à Puno, sur les rives du lac Titicaca, là, ils n’ont pu s’objecter à un arrêt forcé causé par la brigade de petites amibes. Tout de même avant le coucher du soleil, ils n’ont pas hésité à sauter à bord d’un navire pour aller à la rencontre d’un peuple fascinant, celui des Uros, des gens colorés et souriants vivant sur des îles dorées de jonc tressé qui contrastent du bleu magique de ce lac, le plus haut du monde. A Cusco, autre ville coloniale, capitale du Machu Picchu et summum de l’architecture hispanique, il était étonnant de les croiser de bon matin se rendre à l’une de ces nombreuses églises pour prier mais aussi troquer quelques pensées pieuses à contempler l’œuvre artistique de ces lieux bénis. Il est vrai qu’une messe en espagnol, on finit par s’y perdre!

Puis se fut au tour du célèbre Machu Picchu, camouflé dans des montagnes verdoyantes à la limite de l’Amazonie, d’accueillir les fameux souliers rouges. Négligeant la brume et la pluie, qui offrait un spectacle encore plus mystique du site, ils s’aventurèrent dans ses sentiers étroits et escarpés, gravirent ses nombreux paliers, foulèrent les chambres des princesses et des dignes, et les lieux spirituels, se trempèrent l’orteil dans les canaux et en ultime curiosité, ils escaladèrent jusqu’au sommet pour contourner cette pierre énergisante et respirer à pleines semelles toute cette magnificience! Et vous pensez peut être qu’après une telle journée, ils se sont reposés ? C’est mal les connaître. Et non il fallait aussi goûter aux bains d’eau thermale nichés tout en haut du village d’Agua Caliente. C’est là que, poireautant dans une flaque, seuls et penauds de ne pouvoir participer au délice chaleureux, je leur décernai une médaille.

Et cette médaille ne revient à nulle autre qu’à la personne qui les chausse, cette femme extraordinaire, qui ne cesse de m’impressionner et dont je ne cesse d’admirer. Elle souffle ce soir ses quatre-vingt-une chandelles.

Bonne fête maman!

Je t’aime plus haut et plus loin que ce magnifique Machu Picchu!

Tafilleenequateur,

Geneviève xxx